Le Made in Europe, bientôt chinois ?

01 February 2017 /

La gestion de la crise financière de 2008 par les états membres et par Bruxelles a été chaotique. A l’heure où l’union aurait due être de mise, les états ont préféré mener des politiques indépendantes. Ces politiques du « chacun pour soi » n’ont fait qu’envenimer une situation déjà explosive pour la zone euro. Alors que le redressement aurait pu être rapide, s’il avait été coordonné, la croissance européenne est aujourd’hui à la traîne. Une aubaine pour les entreprises chinoises!

© Friends of Europe 2012
© Friends of Europe 2012

L’Europe, quelle crise ?

La politique fiscale et monétaire après la crise économique de 2008 a aggravé la situation déjà explosive de la zone euro. La BCE et les gouvernements nationaux n’ont pas réussi à rétablir la confiance des citoyens en l’économie européenne. Au contraire, l’absence d’un plan de relance au niveau européen a joué énormément dans la propagation de la crise. Par-dessus tout, certaines politiques nationales, non-coordonnées avec les autres états-membres, ont été contre-productives. Ces politiques à plusieurs vitesses ont surtout accentué les variables macroéconomiques (inflation, chômage, endettement, etc.) dans un sens défavorable au redressement économique européen. Ainsi, face à cette désertion de l’Union des états-membres, où la politique du « chacun pour soi » persiste, l’Union n’a fait que sombrer dans les dettes et dans le déficit. La crise a cependant pu être en partie contenue grâce au rôle clé joué par la monnaie unique. En effet, à elle seule, elle a pu supporter la situation économique désastreuse de l’Espagne et de l’Irlande, pour ne nommer que quelques-uns. Sans l’euro, l’Espagne aurait été contrainte de dévaluer massivement sa monnaie et se serait retrouvée confrontée à un endettement insupportable. Reste que, l’absence de coordination au niveau européen dans la gestion de la crise a largement ralenti le redressement face à la crise.

Alors que le redressement aurait pu être rapide, si elle avait été coordonnée, la croissance européenne est aujourd’hui à la traîne. Une aubaine pour les entreprises chinoises !

Dans cette crise financière, ce sont d’abord les ménages mais aussi les entreprises européennes qui sont les premiers touchés. Particulièrement dans la conjoncture actuelle, ces dernières ont des difficultés à obtenir des crédits. Dans certains cas, les entreprises n’ont eu le choix que de se tourner vers les investisseurs étrangers afin de ne pas mettre la clef sous la porte. Une aubaine pour la Chine qui, de manière croissante ces dernières années, investit en masse à l’étranger. Certains spécialistes n’hésitent pas à qualifier ce phénomène de « shopping tour européen ».

La wishlist de Pékin

En 2016, les investisseurs chinois auraient racheté plus de 47 entreprises, et cela rien qu’en Allemagne, cumulant une valeur totale de 10,3 milliards d’euros. Cela représente une croissance de plus de 60 % dans cette frénésie dépensière de la Chine par rapport à l’année précédente. En effet, en 2015, la Chine avait signé au total 29 contrats d’acquisition en Allemagne pour une valeur estimée à 263 millions d’euros. Ainsi, cette tendance jette une autre perspective sur les intentions chinoises et l’avenir de l’investissement étranger chinoise.

Au niveau européen, selon Deloitte, la Chine aurait complété 170 acquisitions d’entreprises européennes d’une valeur de 90 milliards d’euros. Une augmentation de 40 % par rapport aux 122 acquisitions en 2015. Toujours selon l’analyse de la firme Deloitte, l’Allemagne attire le plus d’investisseurs chinois, suivi par le Royaume-Uni, puis de la France. Les secteurs clés seraient le secteur technologique, le e-commerce et le secteur des services financiers. Conséquemment, des entreprises telles que le Club Med, Skyscanner ou encore Putzmeister, pour ne nommer que celles-ci, sont toutes passées sous l’emprise chinoise.

Au niveau européen, selon Deloitte, la Chine aurait complété 170 acquisitions d’entreprises européennes d’une valeur de 90 milliards d’euros. Une augmentation de 40 % par rapport aux 122 acquisitions en 2015.

Plus largement, la Chine semble vouloir être présente dans tous les secteurs. En France, les investisseurs chinois ont plutôt tendance à investir dans les secteurs niches du pays, tels que le tourisme,  l’agroalimentaire ou encore le médical. Au Royaume-Uni, ce sont plutôt les secteurs financier et des services qui intéressent les entreprises chinoises. Mais c’est l’autre côté du Rhin qui attire le plus d’investisseurs. L’Allemagne est en effet le pays où les entreprises chinoises investissent le plus, et ce, principalement pour l’acquisition du secteur technologique, l’Allemagne étant réputée pour son ingénierie.

Ces rachats en masse d’entreprises européennes montrent l’intention des chinois de mener une politique d’expansion internationale. Les vocations économiques n’étant jamais très loin des vocations politiques chinoises, cette offensive entrerait dans une perspective d’ambition internationale afin de se placer en position confortable sur l’échiquier mondial. Faute de pouvoir imposer ses propres entreprises au niveau mondial, la Chine a décidé de racheter les entreprises étrangères.

Dorian Liu est étudiant en Master sciences politiques à l’ULB

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