une jeunesse exclue

21 November 2016 /

Le manque de participation politique des jeunes est souvent présenté comme problématique. Nombreuses raisons pour cette apathie sont avancées. Cependant, la possible explication structurelle – l’exclusion politique et socio-économique des jeunes – est souvent ignorée. Or, cette question est fondamentale car de celle-ci dépendra le succès des solutions mise en place par les politiques pour promouvoir la participation des jeunes.

L’engagement des jeunes: un constat

La participation civique est comprise comme toutes les façons dont les citoyens sont impliqués dans la vie de la communauté. Deux éléments importants  de cette participation sont la participation politique – aller voter ou être engagé dans un mouvement politique ou sociale – et la participation communautaire – être engagé dans une organisation locale comme un club de sport par exemple. Alors que la seconde est souvent plus répandue auprès des jeunes que des adultes, la participation politique est souvent faible auprès de jeune.

Comment comprendre ce manque de participation ? Certains ont cherché à expliquer ce phénomène à travers un désamour croissant pour la politique, et plus particulièrement les politiciens. Cependant, cette apathie touche tous les électeurs (Krémer, 2014), pourquoi se ferait-elle plus ressentir chez les jeunes que chez les adultes ? Il est nécessaire d’approfondir la réflexion.

Une exclusion socio-économique des jeunes

La faible participation des jeunes pourrait être expliquée par leur position sociale dans la société. Ceux-ci sont une catégorie sociale qui est politiquement et socio-économiquement exclue. D’un point de vu socio-économique, les jeunes sont pour la plupart coupé du monde actif ; une majorité d’entre eux sont à l’école, l’université ou bien au chômage.

© Sweetwillis (flickr.com)

Que cela signifie-t-il pour la participation politique des jeunes ? Les implications sont doubles. Premièrement, il existe une relation positive entre le degré d’insertion d’une personne dans des réseaux sociaux – la famille, les amis, les collègues,… – et la probabilité que cette personne participe aux élections (Delwit, 2013). Or, comme la socialisation des jeunes se limite souvent à leur famille, amis et à l’école (Koskimaa and Rapeli, 2015), il n’est pas surprenant de constater une moindre participation chez les jeunes. A cela vient s’ajouter le fait que leur socialisation est un important déterminant de l’intérêt ou non du jeune pour la participation civil. Il y a en effet un lien entre participation politique de la première heure et la probabilité pour un jeune de devenir un citoyen et électeur engagé (Koskimaa and Rapeli, 2015). Cependant, en ce qui concerne l’école, celle-ci sous sa forme actuelle est « un cadre monolithique qui ne laisserait place ni à l’initiative, ni au dialogue, ni à la responsabilisation constructive » (Loriers, 2008). Elle n’est pas un cadre adapté à préparer les jeunes à la vie participative. En ce qui concerne le cadre familial, bien qu’il ait longtemps joué un rôle important dans la transmission des valeurs civiques aux enfants (Shulman and DeAndrea, 2014), on peut se demander dans quelle mesure cela est toujours le cas étant donnée l’apathie générale pour la politique. Secondement, ne pas être actif, cela signifie aussi que les jeunes ne sont souvent pas confrontés à tout ce qui pousse les personnes actives à s’intéresser à la politique : les impôts ou la législation par exemple.

Une exclusion politique des jeunes

Les jeunes sont également politiquement exclus. Ils sont souvent qualifié d’inexpérimenté, raison pour laquelle leurs opinions ne sont pas prises en compte. Un flagrant exemple de ceci a été le Brexit. Or, un principe de base de la démocratie est « l’iségorie » – c’est-à-dire l’égalité de la parole entre les citoyens. Si celui-ci n’est pas respecté cela met en péril la démocratie et marginalise une partie de la population. Cela fût particulièrement constaté dans le cas des femmes qui furent marginalisées pour cause de leur soi-disant infériorité: nombreux pensaient que les femmes, à l’instar des hommes, ne disposaient pas des qualités – la force et la rationalité, par exemple – requises pour assurer de hautes fonctions (Tickner, 2014).

Que cela signifie-t-il pour la participation civique des jeunes ? Ici, les implications sont triples. Premièrement, lors des élections, la jeunesse d’un candidat peut-être un critère disqualifiant pour certains électeurs. Deuxièmement, comme les élites s’auto-cooptent, ce critère peut également être utilisé à l’encontre des plus jeunes candidats. Troisièmement, on peut se demander dans quelle mesure cette perception d’une partie de la population n’a pas des effets directs sur la participation des jeunes. Ceux-ci n’étant pas écoutés finissent par ne plus participer à la vie politique de leur communauté (LSE, 2013). C’est un phénomène avéré : « lorsqu’on se sent exclu du système, de la vie politique ou du processus décisionnel, on se sent en général pas ou moins concerné par l’élection et, proportionnellement, on y prend moins part » (Delwit, 2013).

 

La faible participation politique des jeunes est une problématique complexe. Une façon d’aborder ce problème est de regarder comment la situation sociale des jeunes – leur exclusion politique et socio-économique – a pu influencer leur participation politique. Cet article dès lors appelle à plus de recherche sur le sujet car si ces hypothèses venaient à se vérifier, cela signifierait que toutes solutions techniques au problème (PNUD, 2013) ne résoudraient rien. Non seulement il faudrait des changements significatifs dans le milieu scolaire, mais également un changement dans la représentation de la jeunesse au sein de la société – celle-ci devant acquérir une image plus positive.

Marin Capelle est étudiant en 1ère année à l’Institut d’études européennes.

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